À l’approche des prochaines échéances électorales, le Bloc républicain (BR) se trouve à un tournant décisif dans la 12ᵉ circonscription électorale, notamment dans la commune de Lalo. Plus qu’un simple choix interne, l’écartement de Maurice Houinou s’apparente à une décision politique lourde de conséquences, dont les effets pourraient peser durablement sur les performances électorales du parti.
Dans un environnement politique marqué par une concurrence accrue et une structuration méthodique des partis adverses, chaque décision stratégique compte. Or, en se privant d’un acteur central de son dispositif local, le BR semble avoir fragilisé l’un de ses rares leviers d’influence territoriale. Cette analyse entend démontrer, chiffres et faits à l’appui, que cette décision relève moins d’un ajustement tactique que d’une faute politique majeure, susceptible de coûter cher au parti lors des prochaines élections.
Un leadership électoral éprouvé et des résultats indiscutables
Les faits électoraux sont têtus. Lors des élections communales de mai 2020, le Bloc républicain a enregistré, sous le leadership de Maurice Houinou, une performance remarquable dans la commune de Lalo. Le parti a obtenu cinq conseillers communaux avec plus de 12 000 voix, traduisant une implantation solide et une dynamique militante réelle.
Cette performance n’était pas le fruit du hasard. Elle reposait sur un leadership de proximité, une mobilisation efficace des femmes, des jeunes et de plusieurs couches socioprofessionnelles, ainsi qu’une capacité avérée à fédérer au-delà des clivages traditionnels. À Lalo-centre notamment, le BR a pu bâtir une assise électorale sérieuse et durable, largement attribuable à l’action et à l’influence de Maurice Houinou.
Une régression électorale révélatrice d’un auto-goal politique
La contre-performance enregistrée en 2023 ne saurait être interprétée comme un simple reflux électoral naturel. Elle s’analyse davantage comme un auto-goal politique, résultant de dysfonctionnements internes et de règlements de comptes qui ont lourdement pénalisé le Bloc républicain.
De nombreux éléments indiquent que cette chute de performance a servi de mécanisme de sanction interne, visant à affaiblir certains acteurs, notamment le feu David GBAHOUNGBA , au détriment de l’intérêt collectif du parti. En laissant prospérer ces logiques de punition politique, le BR s’est volontairement privé d’une partie de son potentiel électoral.
Dans un contexte normal, débarrassé de ces tensions internes et de ces stratégies de sabotage, le parti disposait objectivement des moyens pour faire bien mieux. Les dynamiques observées sur le terrain, l’engagement militant et l’enracinement local de certaines figures clés laissaient entrevoir des résultats nettement supérieurs. Autrement dit, le BR a perdu des voix non pas face à l’adversaire, mais contre lui-même.
Une performance électorale porteuse d’espoir
Il convient surtout de saluer la performance réalisée par le Bloc républicain dans la 12ᵉ circonscription électorale lors des législatives de 2023. Malgré un contexte interne difficile et des tensions persistantes, le parti est parvenu à totaliser près de 20 000 voix dans l’ensemble de la circonscription, échouant à seulement 400 voix de l’obtention d’un député.
Ce résultat, loin d’être anodin, démontrait clairement que le potentiel électoral du BR demeurait réel et compétitif. Il mettait en évidence l’existence d’un socle militant et électoral solide, capable de produire des résultats significatifs dès lors que le parti s’appuie sur ses véritables forces humaines, son leadership de terrain et une stratégie cohérente.
L’éviction de Maurice Houinou : une décision incomprise et contre-productive

C’est dans ce contexte que l’écartement de Maurice Houinou, et son départ du poste de DAF du Médiateur de la République, apparaît comme une erreur stratégique monumentale. Selon les enquêtes menées, aucune faute professionnelle ne lui était reprochée. Cette décision, perçue comme destinée à satisfaire certaines susceptibilités internes, a eu pour conséquence directe de faire perdre à la commune le seul poste administratif et politique que le BR avait réussi à conquérir.
Or, dans les réalités politiques locales, les positions administratives et politiques jouent un rôle déterminant dans la mobilisation électorale. Elles structurent l’influence, renforcent la visibilité du parti et servent de leviers d’action sur le terrain. En se privant volontairement de ce capital, le BR de Lalo s’est engagé dans une dynamique d’affaiblissement auto-infligé.
Un risque de reproduction des mêmes erreurs du passé
Le plus préoccupant demeure le fait que les conditions ayant conduit à cet auto-goal politique semblent encore réunies aujourd’hui. Les frustrations non résolues, l’écartement de figures influentes et la persistance de clivages internes créent un terrain propice à la reproduction des mêmes erreurs.
Sans correction rapide, le BR aborde les prochaines élections sans postes stratégiques dans la commune de Lalo, sans leadership fédérateur pleinement assumé et avec une base militante démotivée. Dans un tel contexte, les divisions internes risquent une nouvelle fois de neutraliser les efforts de campagne, au bénéfice direct de l’adversaire.
Or, l’histoire électorale récente montre que chaque fois que le BR s’est laissé piéger par ses propres contradictions, il a offert à ses concurrents un avantage qu’ils se sont empressés d’exploiter.
Face à une UP-R globalement mieux organisée, malgré ses propres défis internes
Il serait réducteur de présenter l’Union Progressiste le Renouveau (UP-R) comme un bloc exempt de tensions internes. Comme toute grande formation politique, l’UP-R connaît également des divergences, des frustrations et des rivalités. Tout n’est donc pas nécessairement rose au sein de ce parti.
Toutefois, la différence majeure réside dans la capacité de ses leaders à identifier rapidement les problèmes et à leur trouver des solutions pragmatiques. L’UP-R a su, dans la plupart des cas, contenir ses crises internes, préserver l’essentiel de sa cohésion et maintenir une discipline stratégique autour des objectifs électoraux.
Cette aptitude à gérer les désaccords sans laisser les conflits paralyser l’action politique confère à l’UP-R un avantage réel. Elle lui permet de rester opérationnelle sur le terrain, de sécuriser ses acquis et de transformer ses fragilités internes en ajustements tactiques, là où d’autres formations s’enlisent.
Dans un contexte de compétition électorale intense, cette capacité d’adaptation et de gestion interne explique en grande partie pourquoi l’UP-R apparaît aujourd’hui plus stable et plus redoutable, malgré des difficultés comparables à celles rencontrées par ses adversaires.
Une leçon politique à tirer pour l’avenir
En politique, les victoires ne se construisent ni sur l’effacement des figures influentes ni sur des décisions prises sans égard pour leur impact sur la base militante. Écarter un acteur majeur, surtout lorsqu’il a démontré sa loyauté, son efficacité et sa capacité de mobilisation, exige méthode, pédagogie et sens du timing. La manière dont une décision est prise compte autant que la décision elle-même.
Les chiffres sont sans appel : plus de 12 000 voix en 2020 sous le leadership de Maurice Houinou, contre moins de 6 000 en 2023. Cette chute brutale traduit un affaiblissement du dispositif électoral du BR à Lalo et met en lumière l’importance stratégique de son enracinement local. Maurice Houinou n’est pas un acteur secondaire ; il constitue un poids lourd politique, dont l’absence laisse un vide difficilement comblable.
À l’inverse, l’UP-R avance avec méthode, organisation et cohérence, capitalisant sur ses ressources humaines et ses choix stratégiques. Dans ce rapport de forces déséquilibré, le BR ne peut se permettre des erreurs d’appréciation. Ignorer l’apport de ses leaders naturels revient à désarmer volontairement son propre camp.
À défaut d’une remise en question lucide et d’un réajustement stratégique, l’éviction de Maurice Houinou pourrait bien apparaître, a posteriori, comme l’une des décisions les plus coûteuses du Bloc républicain dans la commune de Lalo — une erreur dont l’UP-R pourrait tirer durablement profit lors des prochaines échéances électorales.
Aimé DOHOU






